Je suis Dania Balohé, 33 ans, première thanadoula indépendante sur la ville de Tours. Je vous accompagne au deuil et à la fin de vie loins des tabous et au-delà des non-dits.
J’ai validé ma formation de thanadoula au sein de l’Institut Deuils-Doulas de Fin de Vie en janvier 2024. Ma formatrice, Marie-Christine Laville, a elle-même été formée par Rosette Poletti .
Mon Parcours : un chemin tout tracé vers le métier de Thanadoula
Enfance, études et mon rapport à la mort.
Lorsque j’étais enfant, je rêvais d’enseigner et d’être croque-mort.
Il s’avère que mon chemin m’a amené à tenter le concours de médecine en 2010, après l’obtention de mon BAC S, mais je n’ai pas réussi. Ayant deux parents médecins (un père chirurgien viscéral, une mère radiologue), j’ai grandi en admirant leur endurance qu’elle soit émotionnelle, physique ou mentale. Mon échec en première année de médecine m’a montré pourquoi j’étais là. Ce n’était pas tellement le désir d’apprendre à soigner le corps physique mais d’accompagner les cœurs face à la mort. Même si l’anatomie me fascinait, j’étais bien plus intéressée par le rapport des soignants à la mort. Je me suis rapidement rendue compte, que ce soit en 1ere année de médecine ou au contact de mes parents et leurs collègues, que le sujet de la mort était maintenu à distance le plus possible, même si celle-ci était côtoyée au quotidien.
La guerre et la quête du Beau
Et c’était d’autant plus surprenant que mon père étant libanais, nous avons connu la guerre, les morts « inattendues, » « pas naturelles », celles qui vous assomment de par leur violence. La mort nous a toujours accompagnés. Pourtant, il fallait l’accepter comme une réalité inévitable sans jamais discuter en conscience du processus de deuil qui s’enclenche. J’ai grandi avec des images de guerre sur nos écrans, et des parents médecins parlant de patients « mal-en-point ». Nous ne cachions pas la mort chez nous, mais le deuil n’était pas dit.
Intriguée par la façon dont les humains s’approprient la mort et toujours portée par mon désir de transmettre, d’enseigner, je me suis réorientée en faculté d’anglais (licence puis master). J’ai rapidement décidé de me spécialiser en littérature américaine du XIXe siècle et plus spécifiquement sur Edgar Allan Poe, auteur gothique, maître de l’horreur. Une façon pour moi de retrouver de la beauté au milieu de la souffrance, de l’indicible, de l’inavouable, du redoutable. Une façon pour moi de conscientiser que la mort nous invite toujours à vivre pleinement notre vie.
Concours
J’ai obtenu mon CAPES en 2018, et ai validé mon stage de titularisation en 2020. Je me retrouve enseignante d’anglais en lycée, où je transmets la grammaire anglaise, des notions culturelles et historiques sur le monde anglophone. Contexte où le temps pour accompagner les cœurs de mes élèves dans l’apprentissage de la vie (qui n’est que l’autre pendant que d’accompagner les cœurs face à la mort), n’existe pas, ou devrais je dire n’existe plus.
Maladie chronique et deuil de transition
En 2022, suite à une 2ème crise, je suis diagnostiquée épileptique. Une épilepsie tonico-clonique idiopathique qui sort de nulle part. Le non-sens de ma mission d’enseignante, le stress, le manque de sommeil, le manque de reconnaissance… Tout cela a amené les deux crises qui m’ont mise à l’arrêt sans que je puisse résister.
Me voilà donc en arrêt longue maladie, face à une réalité impactante et déroutante: « je ne peux plus continuer ainsi, ma place n’est pas ici ». Et au moment où je suis à terre, déboussolée, le deuil vient me tendre la main pour me rappeler où est ma place. Quel deuil? Être diagnostiquée épileptique a provoqué une scission avant/après des plus angoissantes. Le deuil de transition a pris sa place dans tous les domaines de ma vie: le rapport à mon corps et à sa fatigue, le rapport à mon intellect, le rapport à ma mémoire, la peur de dormir, la peur de la crise, anxiété sociale, la peur de la stigmatisation, le rapport à la sécurité, le rapport à la concentration, le rapport à mon métier, le rapport à mes limites, le rapport à la foule…
Après le choc, la perdition, la négociation, est venu le jour où j’ai verbalisé mon incapacité à retourner devant mes élèves. Les compétences que j’ai acquises en tant qu’enseignante, que ce soit en pédagogie ou en synthèse, me servent au quotidien. Mais il était temps pour moi d’utiliser ces compétences pour être au service des cœurs et non des intellects. J’ai donc décidé de planifier ma reconversion professionnelle.
Formation Thanadoula, la révélation
J’ai recherché les formations suivies par les professionnels du funéraire, supposant que celles-ci inclueraient des éléments de psychologie du deuil. Je suis tombée sur la formation de l’Institut Deuils-Doulas de Fin de Vie (formation qualiopi) transmise par Marie-Christine Laville. Elle a débuté en mai 2023, et a pris fin en janvier 2024, mois où j’ai obtenu le certificat de doula de fin de vie.
Voici le descriptif de la formation
La formation n’a fait que confirmer pour moi la nécessité et l’importance d’accompagner les gens face à la mort. Que ce soit dans le rapport à notre propre mortalité, ou à celle de l’autre, que l’on soit en fin de vie, malade, ou en bonne santé. A mesure des modules, je me suis retrouvée face à toutes les situations qui m’ont amené à choisir et à me saisir de la posture de thanadoula aujourd’hui: l’immigration, les guerres, faire mon stage de 3e à l’hôpital où mes parents travaillent, le meurtre de ma cousine, la crise du Covid-19…
Après avoir validé ma formation, je me suis rapprochée d’une thanatopractrice qui a accepté de me montrer comment réaliser une toilette mortuaire. Assister à ce moment-rituel a été un réel honneur pour moi.
Je poursuis depuis ma formation continue à mon rythme, notamment grâce aux séminaires de la SFAP.
Mes ServicesThanadoula, en quoi ça consiste exactement?
Le métier de Thanadoula demeure méconnu en France. Celui-ci s’est d’abord développé à New York en 2003 puis s’est répandu en Suisse et en Belgique. La formation qualiopi de l’IDDFV n’existe que depuis 2019 en France.
Notre société est vieillissante et la crise du Covid-19 nous a bien démontré à quel point il était central que nous puissions parler librement de la mort, sans tabous ni jugement. Les gens se sentent seuls face à la mort de leur proche et démunis face aux démarches administratives suite au décès. Les thanadoulas peuvent les aider, mais pour l’instant notre métier est inconnu du plus grand nombre.
Pour démocratiser davantage notre métier, j’ai décidé de créer un podcast. Pour écouter l’épisode introductif qui présente le métier de thanadoula, cliquez ici.